Souvenir collant de mon enfance

Comme mon cher père avait choisi de me nommer Catherine, soucieux que mon prénom se prononce aussi bien en français qu’en anglais (why???), ma chère mère avait pris l’habitude de me faire de la tire de la Ste-Catherine, tous les ans, le 25 novembre. La tradition s’est même étirée, c’est le cas de le dire, jusqu’à ce que je sois jeune adulte.

Je la revois, sur la galerie de la maison familiale, étirant et réétirant entre ses mains beurrées la friandise jusqu’à dorée. Mes souvenirs sont assez flous, mais je ne me rappelle pas qu’elle m’ait demandé de l’aide pour le faire à deux. Il me semble pourtant que ça aurait plus facile, bien que certainement aussi plus salissant. Après cet exercice, elle rentrait, la tire tordue entre ses mains et la découpait en bouchées qu’elle déposait dans l’assiette bleue, l’« assiette à jambon » qui avait une autre vocation ce jour-là de l’année.

Et moi, je l’adorais cette tradition. Gloire à mon prénom! Grâce à lui, ma mère préparait quelque chose de si bon, voire même d’un peu festif, juste pour moi, son ange cornu, sa blondinette qui ressemblait bien trop à son père (côté caractère bien sûr). Du moins, c’est comme ça que je voyais les choses. Et ça rendait le partage de la friandise avec les autres membres de ma famille assez pénible. Je leur concédais bien une ou deux bouchées craquantes, mais tout le reste était pour moi. Pas touche. Bas les pattes. On me célébrait après tout.

Quelques années plus tard, l’Ex a repris le flambeau et poursuivi la tradition pendant quelques années. Puis, elle s’est éteinte. Étrangement, bien que la tire soit un véritable délice pour moi, je n’ai jamais envisagé d’en préparer (ou plutôt de m’en préparer) moi-même. Encore aujourd’hui, ce bonbon est un cadeau pour moi (je le sais que ça sonne égoïste un peu, mais bon) : il faut qu’il vienne d’un autre.

Alors voilà, le message est lancé. Qui m’aime étire.

Quand ta mère reprend une tradition pour te faire plaisir chaque année, remercie-là ardemment. Elle pourrait bien décider d’étirer la sauce au-delà de ton enfance.