Ma chère mère et sa neige

J’en ai déjà parlé, ma chère mère demeure encore toute seule dans sa maison, comme elle dit si bien, à 90 ans bien sonnés. Elle a une santé de fer, mais commence à en perdre des bouts. Dans la foulée du confinement qui a un peu bousculé les choses, ma chère sœur et moi, on a donc décidé de prendre un peu ses affaires en main. Mon aînée s’occupe de son épicerie en ligne et des achats de babioles diverses et moi, ben, je paie les factures. Des ratées ont en effet pu être observées au cours de l’année chez différents fournisseurs.

L’anecdote

La grosse affaire de l’année 2020-2021, le déneigement des deux stationnements et de leur accès chez ma mère (qui n’a plus de voiture et qui n’est pas à la veille d’avoir de la visite non plus). Grosse histoire. Deux déneigeurs doivent combiner leurs efforts pour mener à bien cette opération délicate. Le premier pellette à la main (ou plutôt à la pelle) le trottoir qui conduirait ma mère, si elle l’empruntait au moins une fois par hiver, à son entrée no 2, où personne ne se stationne jamais. Le second est en charge du déneigement des stationnements eux-mêmes. Me voilà donc à devoir payer les deux larrons.

La première entreprise accepte les virements bancaires Interac. Elle prend même soin de préciser que, pour le mot de passe à indiquer, il faut choisir les quatre derniers chiffres du numéro de téléphone du client. Je suis toutes les consignes à la lettre, mais il y a gros un hic. Le mec n’arrive pas à encaisser le paiement, because il n’a pas le numéro de téléphone de ma mère. Pouet pouet pouet. Je dois l’appeler pour le lui donner. Sans commentaire.

Ça se complique avec l’autre fournisseur-déneigeur. Celui-là, on peut le payer directement, via AccèsD, ce qui fait bien mon affaire. Par contre, il faut lui retourner sa tite feuille jaune, par la poste, avec le numéro de confirmation de la transaction. Bien sûr, je l’oublie, la tite feuille jaune et je me dis que, comme il a été payé, il va livrer la marchandise. Ben non. Sans tite feuille jaune, pas de balisage des stationnements et, hop, l’horreur, exclusion du parcours du déneigeur. Ça elle l’ignore, la cliente nonagénaire, mais elle en a vu d’autres et elle a vite fait de constater que son voisin, lui, il a ses poteaux-balises (du même cristi de déneigeur) et pas elle. « Comment ça se fait? » « As-tu payé? ». « Y va-tu venir me déneiger? ». Avant de devenir complètement folle, je vais donc porter la tite-feuille jaune directement dans la boîte aux lettres du damné déneigeur et m’entend avec lui le lendemain : l’affaire est ketchup, l’aïeule aura ses balises au cours de la semaine. Les jours passent et pas de poteaux à l’horizon. « Comment ça se fait? » « As-tu payé? ». « Y va-tu venir me déneiger? » « Tu devrais le rappeler ». Là, j’avoue que ça commence à bien faire. Je rassure donc ma chère mère en lui disant que, oui, je vais rappeler son morron-déneigeur, sans avoir vraiment l’intention de le faire. Y a un bout à tout, quand même.

Le dénouement : aujourd’hui, nouvel appel de ma maman : il est venu, le con (elle n’a pas dit ça, mais moi oui), mais un seul des deux stationnements a été balisé. « Comment ça se fait? » « As-tu payé? » « Y va-tu venir me déneiger? ». L’histoire est donc toujours à suivre.

Mise à jour du 4 novembre : selon ce que m’a écrit ma chère sœur ce matin, notre mère a décidé de contacter elle-même son super déneigeur. J’ai eu une bonne pensée pour lui toute la journée.

Quand tu penses que t’occuper des factures de ta mère, qui en paie seulement quelques-unes, ça va être un jeu d’enfants, oublie-ça. Tu ne sais vraiment pas dans quoi tu viens de t’embarquer.