Depuis la convalescence qui a suivi la saloperie, j’ai découvert le grand bonheur de prendre le temps. Et je ne veux plus me presser. J’haïs ça en fait, plus que tout, me sentir brusquée, attendue, en retard, vite vite vite.
Car dans ma vie d’avant (je vous l’ai dit qu’il y avait ma vie d’avant la saloperie et ma vie d’après?), bien que ce n’était certainement pas nécessaire tout le temps, je me sentais dans cet état, pressée. Toujours dans l’urgence, partout ou presque. À l’épicerie (faites, mon dieu, que je ne rencontre personne), au gym sur l’heure du midi (vite vite vite au boulot) et même au spa duquel je revenais au galop pour vaquer à mes obligations familiales.
L’anecdote
Les pires années : celles où je travaillais quotidiennement à Trois-Rivières tout en habitant à Québec, avec un, puis deux enfants en bas âge et un mari à son compte. La galère, je ne vous dis pas. Après deux ans de ce régime où certains me trouvais très hot de pouvoir en faire autant (après tout, y a plein de gens qui font ça, en banlieue de Montréal, se taper 2h30 de route chaque jour : so what?), j’étais sur les genoux. Et pour me convaincre d’aller quelque part en voiture la fin de semaine, il fallait avoir de très bons arguments. Malgré tout ça, entêtée comme je suis, il a fallu une sortie de route en plein mois de janvier, sous la pluie glacée et sans cellulaire, pour que je me décide à démissionner de cet enfer. Il faut dire aussi que quelques semaines plus tôt, après m’avoir écoutée lui raconter les sources de mon immense fatigue, ma chère acupuncteure S. m’avait dit une phrase que je n’oublierai jamais : « Je ne savais pas que tu avais une vie aussi difficile ». Ouf, ça pis recevoir un madrier en pleine face, c’est pas mal pareil. Une révélation. Enfin quelqu’un avait nommé mon malaise. Et j’avais la confirmation que j’avais bien raison de me sentir dépassée et si épuisée.
Tout ça pour dire qu’aujourd’hui, j’ai besoin de prendre mon temps, de prendre le temps de passer d’un état à l’autre. D’une activité à l’autre. Les transitions, j’en ai besoin. L’Amoureux l’a compris et prends désormais quelques minutes après notre journée de travail avant de sauter dans ses souliers de course et de me dire : « On va-tu courir? »
Quand tu as couru toute ta vie de mère de jeunes enfants au travail, tu risques d’avoir pris le pli et d’avoir de la difficulté à ralentir. Prends les moyens et fais-le tout de même. N’attends pas qu’une saloperie t’y oblige.